Pierre-Jean David, dit David d'Angers (1788-1856)
Les Bienfaits de l'imprimerie en Amérique
Vers 1840
Bas-relief en plâtre patiné
Esquisse préparatoire du piédestal du Monument de Gutenberg, place Gutenberg à Strasbourg
70 x 142 cm
Provenance : Victor Pavie ; par descendances
OEuvres de comparaison :
-David d'Angers, Monument à Gutenberg, 1840-1846, bronze, H. 331 cm, Place Gutenberg, Strasbourg ;
-David d'Angers, Les Bienfaits de l'imprimerie en Amérique, 1840, bas-relief en plâtre, modèle original, signé P.J. DAVID D'ANGERS dim. 82 x 143 cm (dans son encadrement 97,4 x 159,2 x 19,3 cm), Angers, Musée des Beaux-Arts, inv. MBA 842.10 ;
-David d'Angers, Étude pour le bas-relief l'Amérique sur papier, dim. 26 x 21 cm, Angers, Musée des Beaux-Arts, inv. MBA 364.2.52 ;
-David d'Angers, Monument à Gutenberg, réplique en fonte, cour des anciens bâtiments de l'Imprimerie Nationale, Paris 15e arrondissement ;
-David d'Angers, Les Bienfaits de l'imprimerie en Amérique, bas-relief en terre cuite, dim. 37 x 58,1 x 7,5 cm, don de Mme Leferme, fille de David d'Angers à l'État en 1903 pour le musée de Lille, Lille, Musée des beaux-arts, inv-74.
Ce grand bas-relief en plâtre réalisé par le chef de fil de la sculpture romantique David d'Angers s'inscrit dans le processus créatif du Monument en l'honneur de Johannes Gutenberg qui l'occupe pendant les années 1835-1842. En Europe, Mayence et Strasbourg se disputent la primauté de la découverte de l'imprimerie. La célébration du quadri-centenaire de cette Révolution culturelle mondiale est l'occasion pour les deux villes de poursuivre cette concurrence : Mayence fait appel au célèbre sculpteur néoclassique danois Bertel Thorvaldsen pour ériger en 1837 son monument en l'honneur de Gutenberg ; tandis que Strasbourg commande dès 1835 un monument à David D'Angers qui vient de se distinguer par la réalisation du Panthéon à Paris (1834-1837). L'artiste réalise à ses frais les maquettes de la statue et des quatre bas-reliefs du piédestal où il illustre les bienfaits de l'imprimerie sur les quatre continents. Républicain convaincu, le sculpteur trouve dans la conception de ce monument un moyen d'exprimer ses idées politiques. Une souscription publique paye toutefois la réalisation de l'oeuvre dans sa version en bronze : la statue impressionnante (331 cm de haut) du génie allemand tenant à la main sa fameuse Bible sur laquelle est inscrite la phrase 'Et la Lumière fut' (Genèse 1,3) est érigée face à la tour nord de la majestueuse cathédrale alsacienne. L'emplacement voulu par l'imprimeur Gustave Silbermann, instigateur du comité pour la construction du monument et fervent républicain était hautement symbolique, tout autant que l'inscription qui accompagne la figure de l'humaniste : « Et la Lumière fut ». Ils font directement référence à la scène extraite du roman de Victor Hugo, Notre Dame de Paris, dans laquelle Frollo conversant avec deux érudits désigne d'une part un livre, et de l'autre, la cathédrale, tout en énonçant « ceci tuera cela » : la presse imprimée (symbole de la Démocratie) évince l'Église (la Théocratie). La figure en bronze de l'illustre homme prit place pour la grande fête séculaire organisée pendant trois jours, du 24 au 26 juin 1840 offrant ainsi à David D'Angers, un moyen d'exprimer ses idées en opposition avec la monarchie de Juillet et ses lois de septembre qui avaient rétabli la Censure.
Fig.1. Emile Simon, Fêtes de Gutenberg à Strasbourg : Inauguration de la statue de Gutenberg, le 24 juin 1840, gravure
Le 31 mai 1840, le sculpteur envoie une lettre à son ami et confident Victor Pavie (p.169 lettre CLVII) dans laquelle il présente sa ligne directrice pour l'inspiration des scènes du piédestal qui accompagnent la figure : 'Je travaille beaucoup pour terminer les modèles des bas-reliefs du monument de Gutenberg. Enfin, voilà encore un ouvrage achevé, et, j'en suis heureux, car je désirais bien ardemment de pouvoir m'acquitter de cet hommage. Thorvaldsen a fait l'homme qui imprime, moi j'ai cherché à rendre les conséquences de la découverte de l'imprimerie. Je t'assure que, dans ma dernière maladie, l'un de mes chagrins les plus amers, c'était la crainte de ne pas terminer ce monument.'
Ces bas-reliefs du piédestal n'étaient toutefois pas achevés pour l'inauguration : trois des scènes sont peintes à fresque et le modèle en plâtre du bas-relief représentant l'Europe, le seul que David ait achevé, est placé provisoirement (non retrouvé) sur le piédestal conçu par MM Blank fils et Stotz. Cette scène lui cause d'ailleurs de fortes réactions et oppositions pendant plusieurs années : la présence de Martin Luther promoteur de la Réforme est considérée comme provocatrice par les Catholiques. David doit s'en défendre et remanier plusieurs fois sa scène : une deuxième fois en ajoutant Bossuet (bas-relief actuellement conservé au musée de
Estim. 20 000 - 30 000 EUR